Le CEA DAM structure son langage métier


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Le CEA DAM structure son langage métier

Par Hélène Jacquenet, conseil en ingénierie documentaire chez ContentSide et Isabelle Gaillard, responsable du projet au sein du Bureau Central des Archives du CEA DAM

Le bureau des archives du CEA DAM (Direction des Application Militaires) a lancé un chantier de ré-ingénierie de son thésaurus. Un projet mené avec une méthodologie efficace et personnalisée qui va faciliter les échanges entre les équipes et la diffusion de la connaissance.

Retour sur cette démarche de co-construction menée conjointement par Isabelle Gaillard, responsable du projet au sein du Bureau Central des Archives du CEA DAM et Hélène Jacquenet, conseil en ingénierie documentaire chez ContentSide.

Comment se comprendre quand on ne parle pas le même langage ? Une question qui ne concerne pas que les traducteurs. « Nous avons initié un projet de ré-ingénierie du thésaurus depuis quelques années. L’objectif étant en quelque sorte, de servir d’interprète entre les différents métiers de l’organisation, en particulier pour les chercheurs. Une démarche et un outil destinés à faciliter et enrichir les échanges », indique Isabelle Gaillard.

« Un mathématicien et un physicien n’emploient pas le même langage. Le documentaliste, et son outil, le thésaurus, sont une passerelle d’intermédiation », illustre Hélène Jacquenet.

L’outil existant avant le projet, basé sur un index fermé et qui comptait environ 11 000 termes n’était pas totalement satisfaisant. « Des liens d’association et de synonymie facilitaient les recherches mais l’absence de hiérarchisation limitait vite le rebond et donc, l’élargissement des recherches dans le fonds », souligne Isabelle Gaillard.

Au démarrage du projet, Isabelle Gaillard s’est rapidement rendu compte de la nécessaire implication d’un regard à la fois, spécialisé dans la documentation et les thésaurus, et extérieur à l’organisation : « Le fait qu’Hélène vienne cadrer ce projet avec des méthodes expérimentées a joué un rôle essentiel dans la réussite de ce projet. Il faut accepter d’être aveugle, faire confiance à la méthode ». Un point sensible pour ne pas céder à la tentation de décrire une connaissance en fonction de la spécificité du métier et du vocabulaire de l’organisation.

Une méthodologie rigoureuse…

Si la première étape de nettoyage des données (normalisation de l’écriture, suppression des mots inutiles…) n’a pas posé de problèmes particuliers, la suite nécessitait de s’appuyer sur une méthodologie. « Les normes et théories existantes, comme l’ISO 25964, sont un bon socle mais il faut avant tout s’adapter au contexte, en particulier quand un index existe déjà », rappelle Hélène Jacquenet.

Dans cette logique, le projet a été l’occasion de développer un guide méthodologique, « qui s’est enrichi au fur à mesure. Sa colonne vertébrale », image Isabelle Gaillard. La deuxième étape a consisté à définir 11 catégories sémantiques, indépendantes des métiers, comme : propriétés, évènements, actions, matériau… et à y affecter exclusivement chaque terme du thésaurus, « de façon univoque », résume Hélène Jacquenet.

Une tâche d’abord basée sur un tri entre entités concrètes et abstraites, puis sur un « logigramme » d’une douzaine de questions, « Peut-on localiser ? Peut-on dater ? Est-ce un produit unique ? … ». Si beaucoup de termes trouvaient naturellement leur place à l’issue de ce processus, d’autres posaient questions, « comme soudure, par exemple, qui renvoie à la fois sur un matériau, une propriété et une action. Dans ces cas, rares, nous avons regardé comment les documents existants étaient déjà indexés. Le fonds a décidé », explique Hélène Jacquenet.

… adaptée au contexte de l’entreprise

Cette étape a permis de lever les problèmes d’ambiguïté et aussi de réduire le nombre de termes. Elle a été suivie par la subdivision de ces catégories en plus petits groupes, pour en faciliter l’appréhension, et l’affectation de liens hiérarchiques. Si certains groupes étaient peu hiérarchisables, comme les localisations géographiques ou les disciplines scientifiques, d’autres ont nécessité un travail d’analyse plus poussés. Pour ce faire, Isabelle Gaillard et ses collègues pouvaient faire appel aux chercheurs du CEA qui ont participé au projet. « La décision dépend de chaque contexte, de chaque organisation, insiste Hélène Jacquenet.

Par exemple, le terme algorithme renvoie à une définition particulière. Dans notre cas, nous l’avons défini comme ‘Autonome fonctionnellement’ et ‘Résultat d’un montage ou d’un modèle’ ».

Finalisé depuis peu, l’outil est aujourd’hui utilisé par des indexeurs. « Il a vocation à évoluer et un groupe de travail émettra et validera les propositions d’ajouts, de modifications ou de suppressions de termes », prévoit Isabelle Gaillard. Il est en cours d’intégration dans les interfaces de recherches pour tous les utilisateurs.

Prochaine étape, accompagner les utilisateurs dans l’utilisation de ce nouvel outil. « Ce n’est pas la fin de cette aventure humaine mais le début d’une nouvelle. Notamment, parce qu’il sera un composant d’un projet de Système d’archivage électronique », conclut Isabelle Gaillard.

À propos

A propos d’Isabelle Gaillard : Documentaliste d’entreprise de formation, Isabelle a été consultante en ingénierie documentaire pendant 10 ans. Spécialiste des langages documentaires, elle a participé à l’élaboration d’une base de connaissance en langage naturel pour France Télécom. Après avoir travaillé aux archives municipales de Bordeaux, c’est en 2004 qu’elle rejoint l’équipe du Bureau Central des archives du CEA DAM.

A propos d’Hélène Jacquenet :  Docteure et qualifiée aux fonctions de Maître de Conférences en Sciences de l’Information et de la Communication, également diplômée du CNAM INTD, avec le titre de Chef de projet en ingénierie documentaire. Cumulant 15 ans d’expérience en conseil, formation et management de projet dans la gestion d’information, Hélène a également animé durant quelques années la délégation régionale lyonnaise de l’ADBS. Spécialiste des dispositifs numériques d’information-communication et des interactions sociales, elle est responsable de l’activité conseil et directrice des opérations chez ContentSide.

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